New York I love you, quand le cinéma déclare sa flamme

New York I Love You vous fera aimer la Cité de l'Atlantique dans ses trépidations et la singularité de ses habitants. Cette oeuvre nous donne à voir ce qu'est l'esprit New Yorkais, cette manière de communiquer avec spontanéité dans un espace où nul n'est anonyme. Une ville où tout peut arriver, où les vies peuvent basculer et les destinées se transcender en l'espace d'un bref instant. Dans New York I Love You, les rencontres se nouent sur une déclinaison de courtes histoires dont le dénominateur commun est une femme qui promène l'oeil de son camescope dans les rues de la ville et devient ainsi le témoin des destinées qui prennent corps en sa discrète présence.

Au coeur de Midtown comme dans les Villages, les New Yorkais vivent à toute allure et font vivre leurs amours au rythme des pulsations de la ville  et des rituels du quotidien. Dans cet univers, champs ouvert à tous les possibles, faire une pause cigarette hors du restaurant où l'on dîne peut faire naître des rencontres épiques. Ainsi une femme drague un homme qui s'avère être son mari. Ou un séducteur de bas étage aborde une fille (Ethan Hawke au sommet de sa forme dans la gaucherie potache du dragueur de rue) et tente de la séduire avec des provocations érotiques. Il la prend pour une jeune femme effarouchée, elle se révèlea prostituée, laissant sans voix l'impudent.

A travers le prisme de courtes histoires, la ville se donne à voir dans la diversité culturelle de ses habitants. Ainsi, cette scène au coeur de Diamonds Row ou se nouent des liens ambigus entre un diamantaire Pakistanais et une bijoutière juive de Brooklyn. L'échange d'abord professionnel se mue en confidences intimes  qui révèlent à notre regard des sentiments plus profonds. Elle, s'apprête à épouser un juif assydique. Lui, vit sa vie à travers sa foi Indouiste. Le poids des traditions l'emporte donc mais les pensées intimes demeurent envers et contre tous. Au cours du mariage, le visage de l'ami pakistanais se substitue en l'espace d'un moment furtif à celui du mari.

Amours sans issue, amours perdues, amours retrouvées, ou amours inachevées, les sentiments se déclinent sur le mode new yorkais, spontané, libertaire, et singulier à l'image de cette ville bouillonnante. Mais dans la cité si vivante, le drame est aussi sosu-jacent comme l'illustre cette relation troublante, pétrie de non-dits, qui s'instaure entre une cantatrice sur le déclin et le jeune groom claudiquant d'un hôtel dont elle semble être la seule hôte. Nous comprenons au fil des échanges, subtilement distillés, que l'artiste est venue en ces lieux pour mettre fin à ses jours dans la plus grande des solitudes. Le jeune groom, dans la fraîcheur de sa jeunesse et en dépit de son handicap, sera le ressort salvateur qui lui fera renoncer à une telle extrémité. Mais là encore le singulier rattrape les personnages et leur réserve une issue inattendue. Cette histoire est sans nul doute l'une des plus réussies de l'oeuvre et l'interprétation du trio d'acteurs Julie Christie, John Hurt et Shia La Bouf n'est y certes pas étranger.

On peut également citer dans le même registre, l'histoire de ce peintre de Chinatown qui veut faire le portrait de cette jeune chinoise qui rêve sa vie plus qu'elle ne la vit, en otage de son père autoritaire et traditionnaliste. Après plusieurs jours de patiente observation, l'artiste trouve le courage de l'aborder mais celle-ci ne consentira pas à être sujet de création. Mais lorsqu'elle décidera enfin de donner des couleurs à sa vie ordinaire et opprimée, il sera trop tard...Le temps qui passe à New York comme ailleurs tue les espoirs et foudroie les amours.

Les destins se mêlent et s'emmêlent toute génération confondue et c'est sur le savoureux dialogue de deux légendes de la scène new yorkaise  que s'achève ce singulier voyage dans les artères palpitantes de la Cité de l'Atlantique. Elie Wallach et Claris Leachman campent un couple au crépuscule de sa vie qui prend soudainement le temps de se dire toutes ces choses que l'on n'exprime pas. Ces échanges à la fois amusants et bouleversants est l'éclatante illustration de toute l'intelligence de ce New York I Love You.

Ce film qui rend hommage à la ville à travers le destin de ses habitants ravira ceux qui connaissent New York. Chaque histoire leur donnera un sentiment de déjà-vue en forme de clins d'oeil et de private jokes. Cette oeuvre donnera également envie à ceux qui ne connaissent pas d'aller à la rencontre de cette ville où chacun vit le jour présent comme s'il était le dernier. New york I Love You magnifie, en effet, la capacité des New Yorkais à être continuellement dans le moment présent. C'est ce que l'on retient avant tout de New York quand on en revient. C'est préciséement ce dont nous fait l'offrande New York I Love You.

Brigitte MAROILLAT